Caresse aquatique [ Yilna ]

Le soleil commençait à se coucher, disparaissant progressivement derrière les hautes montagnes qui pointaient à l’horizon. Petit à petit, la lueur de l’astre d’or se mourait, temporairement, le temps que la période nocturne soit une fois de plus révolue. Non loin de la grande forêt appartenant à Cassilmena se trouvait un lac, entouré par les arbres avoisinants. Il était l’unique source d’eau jusqu’alors potable et consommable par les habitants, tels que les elfes, les nains et autres races qui occupaient les environs. Glow faisait partie de ces personnes qui monopolisaient très souvent cette source d’eau, apaisante et capricieuse aussi. Elle renfermait quelques mystères que beaucoup ignoraient, et qu’elle négligeait elle-même. Elle ne voyait en ce lac nébuleux, qu’un espoir qui permettait à la vie de subsister quoiqu’il arrive. Ce qu’elle aimait par-dessus tout, c’était de quitter ses bois pour se diriger en direction de la source. Là, elle s’approchait des clapotis qu’elle pouvait entendre avec aisance, laissant échapper un soupir de bien-être. La lune allait bientôt montrer le bout de son nez, accompagnant l’entrée en scène des étoiles dans la voûte céleste. Du haut de leurs perchoirs nuageux, les anges pouvaient apercevoir l’elfe aux petites oreilles, et à la longue chevelure rougeâtre s’approcher. Arborant un sourire tendre et affectueux à l’égard de cette nature qu’elle adulait, elle releva légèrement le tissu immaculé qui enveloppait son corps. Prenant la forme d’une toge, telle que les portaient les grandes dames romaines, elle dévoila ses petons, fins et menus, qu’elle trempa gracieusement dans l’eau. Assise au bord du lac, elle contempla le ciel constellé d’étoiles. Comme elle appréciait cette vision féérique ! On ne pouvait voir ça qu’en étant très proche de la nature, et c’était un des moments de la journée qui privilégiait le peuple des elfes.

Glow fut tout simplement émerveillée, bien qu’elle voyait ça depuis qu’elle était toute petite. Elle ne pouvait s’empêcher de redécouvrir les phénomènes de la nature, sans quoi son esprit ne serait plus ouvert à rien. Sa magnanimité émanait en grande partie de l’amour qu’elle portait à cette forêt, et à ce lac qu’elle voulait à tout prix protéger. Passant une main leste dans sa chevelure, les mèches épaisses dont elle s’empara se divisèrent en plusieurs autres, donnant ainsi l’impression de s’effilocher. Elle les laissa retomber mollement sur son épaule, reproduisant le même geste, jusqu’à ce qu’elle soit rejointe par Feather. Il s’agissait de la fée qui l’accompagnait depuis toujours, et qu’elle avait rencontré avant que les continents du Yin et du Yang ne disparaissent, pour devenir celui de Cassilmena. Elle se souvint de l’existence de l’île du dragon, ainsi que des autres parcelles de terre qu’elle avait foulé. Elle se les remémora comme si c’était hier, et en éprouva beaucoup de mélancolie.

Elle aurait voulu profiter de ces réminiscences plus longuement, mais elle crut voir les buissons se mouvoir. Ils se situaient à quelques mètres du lac, le cernant complètement. L’elfe fronça ses sourcils, et posa une main prudente sur l’arc qu’elle avait déposé à ses côtés. Elle le posa par précaution sur ses genoux. Feather fut la première à s’inquiéter, se posant sur l’épaule droite de sa maîtresse. Fouettant l’air de ses jambes ballantes, elle jeta un coup d’œil derrière elle et s’interrogea tout comme Glow, de la provenance de la sonorité. Aussitôt, les bruissements se propagèrent et se firent plus nombreux. Elles n’étaient plus seules, et l’elfe fut la première personne à s’inquiéter de cette présence, étrange soit-elle. Cependant, elle n’eut pas à s’inquiéter longtemps. Il s’agissait simplement d’un adorable lapin aux longues oreilles penaudes qui, émergeant de sa cachette, s’approcha de la créature forestière. Glow tendit une main affable en sa direction. Il fut accueilli par quelques caresses et s’enfuit en quelques bonds, disparaissant dans l’obscurité de la nuit.

Désormais, plus aucun rayon de soleil n’éclairait le berceau des anges. Il ne restait plus que la pénombre pour guider les pas de l’elfette, plutôt angoissée par cette frayeur qu’elle venait de se faire. Feather soupira longuement, se détachant de l’épaule de Glow pour s’approcher de la rive. La Grande Demoiselle toute de blanc vêtue, crut déceler une autre présence, mais plus imposante cette fois-ci. Elle fit volte-face, se releva rapide comme l’éclair, et aperçut une silhouette qui se détachait des ténèbres. Elle lui parut humaine, mais elle ne comptait pas abaisser son arc tant qu’elle ne s’était pas montrée entièrement. Ses sourcils froncés, et sa mine durcie, elle continuait de viser, prête à décocher une flèche si jamais il s’agissait d’un ennemi.

« Qui va là ? »

La petite fée qui pataugeait au bord du lac, fut intriguée par l’anxiété de sa maîtresse. Elle voleta jusqu’à elle et resta en suspension, à tir d’ailes.

« Il s’agit probablement d’un visiteur imprudent, Glow ! »

Imprudent…il y avait de quoi l’être ! Après le Mal qui avait rongé les continents du Yin et du Yang, n’importe quelle créature sordide pouvait jaillir de la pénombre nocturne, pour vous égorger sur place. Glow avait eu l’occasion de se retrouver devant des hybrides, des animaux ayant subi des effets secondaires peu après les évènements qui avaient touché le continent. Elles se faisaient violence, et devaient être exterminées, quand bien même si les elfes prônaient pour une bonne entente entre les êtres à deux pattes, et les animaux qu’ils côtoyaient.

[ Pardon pour la banalité du post ! Ca ira mieux quand ça commencera pour de bon ! =/ ]

Yilna marchait, les yeux mis-clos, poussé par son habitude à errer sans but, à continuer d’avancer tout droit sans savoir où aller. Le jour déclinait peu à peu, le crépuscule régnant pour l’heure sur ce petit bout de terre. La karnash se mit à fredonner, il s’agissait plus d’un chant d’oiseau que d’une chanson humaine, voilà bien longtemps qu’elle n’avait pas chanter ainsi. La karnash regarda le ciel, l’obscurité gagnait peu à peu sur la lumière. Yilna resta là, parfaitement immobile, regarda enfin où elle se trouvait. Elle n’était pas bien loin du lac, quelque part entre les arbres. La karnash respira profondément en regardant la lune chassait les derniers restes des lumières du jour. Elle fut bientôt rejoint par des étoiles. La karnash s’étira et fit quelque pas de plus. Un bruit précipité la fit tourner la tête, fixant un lapin qui avait déboulé en trombe devant elle. Il la fixa pendant quelques secondes avant de filer quelque pas plus loin dans les buissons. Yilna eut un petit sourire amusé.

Elle se demanda vaguement ce que le lapin avait bien pu penser de cette étrange marchant pieds nus dans le noir. Ses yeux vairons sembler contempler un monde qui se trouvait bien loin profondément perdu en elle, et l’instant d’après être complètement connecté sur ce monde-ci. A en devenir presque effrayant de profondeur. De toute façon le sabre qu’elle portait dans son dos, bien calé entre ses omoplates ne laissait aucun doute sur le fait que la jeune femme était une guerrière. Et bien plus encore. Une légère brise souffla sur les joues de Yilna, qui cessa de penser au lapin qui de toute façon était déjà parti vagabonder ailleurs. Tient, n’avait-il pas traversé ces buissons là-bas ?

La karnash se remit en route aussi silencieuse qu’une brise, elle s’immobilisa dans la l’ombre lorsqu’elle aperçut le lac. Ce n’était pas l’étendue d’eau qui l’avait stoppé mais la personne qui se trouvait déjà là. Elle pointait son arc vers la karnash méfiante. Il est vrai que les temps qui courraient avaient tendance à avoir cet effet sur pas mal de monde. Cela n’inquiéta pas outre mesure la karnash, bien qu’il aurait été fort désagréable de se prendre une flèche, Yilna se trouver dans l’ombre, et le vent soufflait toujours. Trop légèrement pour que les moins attentifs s’en rende compte. Yilna n’était cependant pas venu se battre, elle était venue…pour rien en réalité. La jeune femme fit un pas en avant, l’air nonchalante, de manière à se trouver éclairer par la lune. Elle ne savait pas si l’archère avait l’intention de tirer, il n’était cependant pas nécessaire qu’elle se prenne une flèche immédiatement. En plus d’être douloureux c’est petit morceau de bois se révélait souvent empoisonné ou autre amusement du genre.

« Quelqu’un qui ne tient pas son arme à la main »

Yilna avait répondu sur un ton calme, presque distant, comme si la karnash ne se trouvait pas vraiment là. Elle observa un moment la personne qui lui faisait face quand soudainement la lumière se fit dans son esprit. Le vent vint lui murmurer à l’oreille la confirmation de ses doutes. Elle se trouvait face à une elfe…une elfe. Longtemps on lui avait rabâché qu’elle n’était que la mauvaise face de cette noble race, heureusement pour Yilna cela lui avait glissé dessus sans l’atteindre. Non si elle s’était arrêtée sur le fait d’être face à une elfe c’était pour une tout autre raison. Mais là n’était pas la question, Yilna ne jugeait jamais une personne en fonction de sa race, des rumeurs ou de son apparence. Même si le fait de se faire menacer par une personne en pleine nuit près du lac ne l’enchantait pas outre mesure.

« Si vous aviez l’intention de tirer, il aurait fallut le faire immédiatement »

Yilna se trouvait à quelques mètres de l’elfe, éclairé par la lune. Il est vrai que cela pouvait sembler être une position bien dangereuse pour la karnash, mais à la seconde ou elle avait aperçu l’arc, elle s’était préparé à esquiver. Maintenant qu’elle s’était rapprochée, elle pouvait faire bien plus encore. Quoi qu’il en soit, pour le moment la karnash n’avait pas l’intention d’attaquer, pas plus que de bouger en réalité. Elle se remit à chanter.

Puis se tut.

hj: il est très bien ton post ^_-

Lorsque la silhouette s’avéra être celle d’une jeune femme, l’elfe continua de brandir son arc avec moins d’assurance, comprenant que la personne en question n’était pas là dans l’intention de se battre. Elle émit un soupir lorsque les paroles de son interlocutrice parvinrent à ses oreilles, lui sommant probablement de ne pas insister. Etant donné que l’esquive de l’inconnue avait été directe, il n’était plus utile de décocher une flèche, si ce n’était dans le vent total. Abaissant son arme, Glow n’était pas non plus là pour se quereller avec le premier aventurier qui passait. Elle maudissait la rivalité ainsi que l’adversité, et prônait pour une harmonie néanmoins utopique entre les races. Elle était comme ça, et vivait dans des rêves dont tout le monde riait allègrement, sauf elle qui persistait à y croire. Ses yeux sanguinolents observèrent la seconde protagoniste qui ne manquait pas de confiance en elle. Elle savait ce qu’elle faisait, cela se devinait comme le nez au milieu de la figure. Contre une personne de cette envergure, le combat risquerait d’être rude, et après ce qu’elle avait vécu, que ce fusse avec Dianka ou avec d’autres compagnons, elle préférait faire une trêve.

Sans piper mot, l’elfe à la frêle carrure et à la silhouette filiforme, qui n’en était pas moins habile de ses mains, tourna le dos à son interlocutrice et revint auprès du lac. Elle plongea de nouveau ses pieds dans l’eau, non désireuse de connaître la race de sa nouvelle tueuse d’ennui. Loin d’elle l’idée de juger selon le sang qui coulait dans les veines d’autrui. Déjà, elle ne supportait pas qu’on la juge en tant qu’elfe, sous prétexte qu’elle bénéficiait de la jeunesse éternelle, ainsi que de vertus intellectuelles qu’on lui enviait. Par conséquent, il n’y avait aucune raison de lorgner son prochain, selon sa race et la voie à laquelle il appartenait. Chacun était libre de décider quel chemin il lui fallait prendre, et tout le monde avait le droit de prendre son destin en main, sans risquer d’être critiqué. L’elfe continua de barboter dans l’eau, réfléchissant à ce qu’avait précédemment dit la karnash. Elle avait cru l’entendre fredonner un chant aux origines inconnues, dont les notes se suivaient telle une rhapsodie. Le silence revint à la charge, il n’y eut plus aucun bruissement, seulement le clapotis de l’eau.

« De toute façon, je ne suis pas d’humeur à me battre. Je n’ai fait ça que par instinct, et je m’en excuse, qui que vous soyez. »

Elle hocha positivement de la tête, en accord total avec ce qu’elle venait de prétendre. Après tout, la nuit signifiait la mort de tout, annonçant les prémices d’une résurrection lorsque l’aube viendrait. Elle voulait juste contempler les étoiles, ses pieds plongés dans une eau froide et cristalline, une brise légère soulevant les tissus qui enveloppaient son corps, ainsi que ses cheveux.

« Vous ne devriez pas rester ici en pleine nuit, ça peut être très dangereux, surtout en ce temps où l’équilibre entre le Bien et le Mal est instable. »

Il s’agissait d’un conseil comme un autre, au cas où son interlocutrice ne savait pas ce qui l’attendait sur ces contrées tout juste renouvelées. Elle ne voulait pas se sentir responsable du trépas de quelqu’un, bien qu’elle ne doutait pas de la puissance de la karnash. Elle cherchait juste à protéger tout ce qui bougeait, sans faire de distinction entre ce qui était juste ou non. Sa miséricorde allait si loin, qu’elle n’en devenait que plus dangereuse pour celle qui l’exerçait. En cette période de remise en question, il n’y avait pas intérêt d’être sage avec tous les voyageurs que l’on rencontrait, car certains pouvaient se montrer aussi viles qu’une anguille sous la roche. Mais dans son infinie naïveté, et parce que l’elfe avait encore du mal à réaliser ce qui lui était arrivé jusqu’à présent, elle poursuivait son bonhomme de chemin. Combien de fois lui avait-on reproché ses gentillesses et ses formes exagérées de politesse ? Elle ne les comptait plus, tant elle les trouvait fastidieuses. Elle ne supportait pas les reproches, mais acceptait de les écouter, dans l’éventualité où ça pourrait l’aider à progresser. Pour ce qui était du reste, ça lui passait au(-dessus et elle préférait ne plus y penser.

Pendant qu’elle méditait profondément, aussi inerte qu’une statue exposée dans un musée, Feather battit de l’aile jusqu’à la nouvelle visiteuse que voici. Yilna put la voir papillonner autour d’elle, tendant à l’identifier, que ce soit par son odeur, l’aura qu’elle dégageait ainsi que tout ce qui lui appartenait de près ou de loin. Sa maîtresse était songeuse, au bord de son lac, et ne paraissait pas d’humeur à discuter. La mélancolie était trop présente pour lui permettre de mener correctement une conversation, et jetant un coup d’œil par-dessus son épaule, elle ne put s’empêcher d’observer rêveusement la karnash. Feather persistait à la taquiner que ce soit en se posant furtivement sur sa tête puis sur son épaule, curieuse mais peu bavarde. Trop habituée à être muette, elle avait du mal à comprendre que sa voix était désormais à entière disposition. Dianka, une génie, la lui avait offerte sous la demande de son premier maître, qui avait été Glow en personne.

« Vous ne voulez pas venir plus près du lac ? De nuit, il était encore plus scintillant que lorsque le soleil est à son zénith. »

Une invitation faite par une elfe, à une karnash, dont on savait que la race était réputée pour son goût de la guerre. Cependant, quelques uns, parmi elle, auront accepté de sacrifier une partie de leur temps pour protéger les forêts. Peut-être que Yilna faisait partie de ceux là.

» Yilna Swam
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