Une nouvelle vie (libre) (terminé)

Elle n'avait aucune raison de se préoccuper de lui, Sanosaki le savait, et c'était mieux ainsi. Elle devait se concentrer sur les ennemis. Il saurait se défendre seul. Lui pouvait se permettre de garder un oeil sur elle. À moins d'avoir une arme enchantée bien particulière ou faite d'un minéral très rigide, jamais les monstres n'arriveraient à le toucher, à le blesser. Mais les créatures n'étaient pas stupides: elles allaient rapidement converger vers l'humaine, moins rapide, moins forte au niveau physique, même si elle était tout de même très douée, selon lui. Ainsi, il démolissait ceux qui l'approchaient de trop près, lorsqu'une flèche vint se planter dans sa main. Il riposta aussitôt avec une volée d'aiguilles, mais la douleur intense et l'élancement que lui causait la blessure lui signala la présence d'un venin. Rien de très dangereux dans l'immédiat, mais ses doigts s'engourdissaient, et cela ne lui plaisait pas. D'un mouvement brusque, il ôta la flèche, transperçant du même fait un autre gobelin, et il garda son ouïe en grande alerte. Chacun de ses sens stimulait un réflexe différent, et celui de ses oreilles lui permettait d'éviter les projectiles arrivant dans sa direction, et de ne pas éviter ceux qui ne présentaient aucun risque. L'entraînement qu'il avait vécu dans les neuf dernières années avait travaillé chacun de ses sens, afin de compenser la vue qui lui manquait, étant donné que, comme un chien, il ne voyait que le jaune et le bleu, le reste n'étant que gris, blanc ou noir. Pas trop pratique dans la pénombre... Sans compter qu'il était pratiquement borgne, son oeil gauche étant dans un état déplorable. Il avait dû travailler énormément pour développer ce qu'il avait, et remerciait le destin de l'avoir placé sur le chemin où il marchait, car jamais il n'aurait pu compenser ses faiblesses. Mais il s'interrogeait plutôt sur l'archer, et en vint lui-même à une conclusion très réaliste.

*Aucun de ces gobelins, qui foncent sans penser, ne saurait se servir d'un arc. Par contre, le chef n'est habituellement pas aussi stupide, mais...*

La conclusion qu'il en tira le mit sur un pied d'alerte. Ces créatures avaient les bras bien trop courts pour pouvoir manier un arc de grandeur humaine, et ils leur volaient leurs armes, ils ne fabriquaient rien. Le chef allait être très facile à reconnaître...

"Écoute! Leur chef a un arc en main, et il sait s'en servir! Je ne sais pas comment il fait exactement pour tirer, mais il est au minimum aussi grand que toi parce que sinon jamais il ne serait capable de le tendre pour tirer! C'est essentiellement moi qu'il vise, mais fais..."

Il s'accroupit brusquement, puis se releva et embrocha un autre monstre avec son katana, pour l'envoyer renverser les autres arrivants.

"Fais attention quand même!"

Mais il restait quand même inquiet. Ces créatures semi-humaines étaient habituellement comme lui, pratiquement aveugles dans l'ombre, alors comment faisait-il pour lui tirer dessus?

Elle ne s'occupa pas du cadavre au sol, attentive plutôt à tout ce qui se passait autour d'elle. Elle surveillait du regard l'un d'entre eux qui s'approchait d'elle un peu plus doucement, sans doute méfiant, lorsqu'elle entendit le sifflement de la flèche dans l'air. Elle ne savait pas d'où provenait le projectile. Elle savait juste qu'il avait atteint sa cible. Elle jeta un rapide coup d'oeil à Sanosaki afin de s'assurer qu'il n'allait pas trop mal, et c'est le moment que choisit le gobelin pour passer à l'attaque. Effectivement, il sentait que sa proie était occupée ailleurs et il en profita. Elle sentit juste l'impact de la bestiole contre elle, lui coupant momentanément le souffle. Elle réagit du plus vite qu'elle pût, jouant de ses lames pour se débarrasser de la sangsue. Il finit par lâcher son emprise, alors qu'il lui enserrait le cou pour l'étrangler. Elle reprit une goulée d'air, avant de le foudroyer du regard. Elle marmonna entre ses lèvres avant de le blesser une seconde fois. Elle n'avait pas été assez rapide et il n'était que partiellement blessé au bras et au visage. Il tenta de s'écarter un peu d'elle, se demandant si il avait fait le bon choix en s'en prenant à la jeune fille.

"Écoute! Leur chef a un arc en main, et il sait s'en servir! Je ne sais pas comment il fait exactement pour tirer, mais il est au minimum aussi grand que toi parce que sinon jamais il ne serait capable de le tendre pour tirer! C'est essentiellement moi qu'il vise, mais fais..."

Kime regarda autour d'elle, essayant d'apercevoir leur invisible ennemi. Elle le chercha aux alentours, puis sur les toits. Elle surveillait en même temps les gobelins qui se rapprochaient de plus en plus dangereusement. L'inconnu commit la faute de tirer une nouvelle flèche en leur direction. La jeune fille entendit son sifflement mortel à temps et roulant au sol, parvint à y échapper. Elle se planta dans le corps d'un des gobelins qui s'apprêtait à lui sauter dessus. Elle esquissa un sourire satisfait. Elle s'en tirer pas trop mal. Elle se rapprocha de Sanosaki et murmura après s'être redressée, et dos à lui, quelle était la position de l'archer.

- Il est là-haut sur le toit. Il se cache derrière la cheminée de temps en temps.

La seconde flèche, il l'entendit venir. Mais ce n'était pas lui qu'elle visait. Il s'assura que la jeune femme se porte bien, continuant tout de même de repousser les créatures semi-humaines qui se jetaient sur lui sans hésiter une seule seconde. Ses longs bras lui permettaient de se placer hors de la portée des armes ennemies. Mais l'archer, peu importe comment il arrivait à viser pour tirer dans la pénombre, représentait un danger plus important, et Sanosaki sentait le poison se frayer un chemin dans ses veines, sans rencontrer beaucoup de résistance.

*Ça viendra, ça viendra...*

Il savait fort bien que sa magie viendrait le débarrasser de la menace, mais il ignorait quand et combien de temps cela lui prendrait. Mais il savait deux choses: la première était qu'il ne devait pas se faire toucher une seconde fois. Il décida d'y remédier lorsque celle qui demandait à ce qu'on l'appelle Brume Obscure lui facilita la tâche en lui révélant la position de l'archer.

- Il est là-haut sur le toit. Il se cache derrière la cheminée de temps en temps.

-Merci. Je reviens dans deux minutes...

Il leva les yeux vers l'endroit, et écouta plus attentivement. Il captait une odeur de poison venant de cet endroit. Utilisant son don de vitesse accrue, il prit un bon élan et se projeta sur le toit. Il entendait les flèches siffler de chaque côté de lui, mais il était trop rapide. Il atterrit sur la cheminée, et sortit son katana. L'archer n'eut pas le temps de sortir une autre flèche de son carquois, sa tête roulait déjà sur le sol. Pourtant, les subordonnés ne cessaient pas d'attaquer...

*Il y a un réel chef... Il n'est pas un monstre, en tout cas, pas physiquement... Les seuls autres que je sens sont en bas...D'ailleurs je ferais mieux d'y retourner...*

Il se jeta sur eux, la lame de son arme pointée vers le sol, et il en embrocha un tout en en écrasant un autre. Il cherchait autour un endroit où un ennemi pourrait se cacher, puis il constata que les ennemis étaient beaucoup moins nombreux. C'était quelque chose qui lui plaisait. Il en décapita un autre, lorsqu'un éclat de sang l'atteignit, même à l'intérieur de l'une des manches de son manteau. Il comprit alors quelque chose qui lui avait échappé: pourquoi l'archer n'était-il pas le chef de la bande? Simplement parce qu'un autre possédait une arme plus puissante!

"Foutu voleur... J'espère simplement qu'il n'a pas appris à s'en servir..."

Le monstre avait disparu, mais Sanosaki était très bien placé pour savoir qu'il n'aurait pas besoin d'être tout près pour utiliser le don destructeur. Un simple claquement de doigts suffirait... Le son qu'il entendit ne fut rien par rapport à la douleur intense qu'il ressentit lorsque le sang traversa sa mince peau. Il lâcha un fort cri de douleur, un cri qui était devenu inhumain, et tomba à genoux, les yeux presque exorbités, le regard empli d'une démence qui n'était pas encore arrivée...

Elle venait de lui fournir les informations dont il avait besoin pour se débarrasser de leur ennemi. Kime était cependant un peu intriguée.

*Comment avait-il put ne pas le voir?*

Elle n'avait pas une vision meilleure qu'un autre. Elle chassa ses pensées qui pouvait la distraire dans un instant si crucial. Elle le suivit vaguement du regard tandis qu'il sautait aisément sur le toit. Kime reporta alors son attention sur les gobelins et s'aperçut avec soulagement que la bande se réduisait. Ces bêtes semblaient sans crainte, animés d'une fureur incroyable. Elle sentit la présence de l'un d'entre eux dans son dos. Tournant sur elle-même elle décocha un coup de pied à la bestiole, tout en finissant de tourner. Elle savait que le coup ne serait pas mortel mais il fallait absolument qu'elle l'empêche de trop s'approcher. Elle n'avait aucune envie de finir entre leurs mains. Et dire que si elle n'avait pas été obligé de s'arrêter à cause de cet étranger, elle serait sans doute loin à cet heure, dans une chambre confortable. Sanosaki comme répondant à ses pensées redescendit du toit se débarrassant des deux gobelins qui fonçaient sur elle. Elle en profita donc pour finir celui qui était encore à terre.

"Foutu voleur... J'espère simplement qu'il n'a pas appris à s'en servir..."

Elle écouta vaguement Sanosaki sans vraiment comprendre à quoi il faisait référence. Se servir de quoi, elle ne le savait pas.
C'est lorsqu'il poussa un fort cri de douleur qu'elle délaissa sa proie pour regarder le métamorphe, un peu inquiète. Que lui arrivait-il? Il était à genoux avec un regard de dément qui lui donna la chair de poule. Il était en position plus faible, il fallait donc qu'elle tente de le protéger si une de ces bestioles tentaient de s'approcher de lui.

Kime se plaça donc entre lui et les gobelins et continua de se battre. Cependant, son bras commençait un peu à faiblir et ses gestes n'étaient plus aussi sûrs et destructeurs. Il s'agissait de gagner du temps. Heureusement il devait en rester plus que trois.

À peine venait-il de tomber à genoux que l'humaine venait se placer entre lui et les gobelins. Lui qui allait peut-être comprendre la raison de cette folie meurtrière qui s'était emparée de lui à quelques reprises depuis neuf ans, il savait très bien qu'elle se manifestait lorsqu'il était en grand danger, mais il venait de découvrir que la douleur était un autre déclencheur! Un autre moyen d'acquérir une maîtrise presque absolue sur son corps, ou plutôt de la fortifier! Il la regarda en finir avec les trois créatures qui restaient, puis leva la tête, humant l'air, les yeux fermés. Il cherchait qui lui avait fait cela, car le sang coulait abondamment de son bras, une petite flaque rouge grandissait déjà sur le sol. Il se releva, le membre blessé l'élançant terriblement, mais ce n'était pas sa première préoccupation.

*Du calme...caaaaaalmeeeeee...*

Il respira profondément, et il sentit son système revenir à son état normal. Ensuite, l'air de rien, il sortit d'une de ses larges et longues manches bandages et quelques autres petites choses pour panser la plaie. Il hésita un moment avant de relever sa manche: ça n'allait pas être beau à voir, il le savait, et cela ne le dérangeait pas. Mais qu'allait dire la jeune femme? Il sentait que déjà, les vaisseaux sanguins s'étaient regénérés, mais il n'en était pas de même pour la peau elle-même, et il se doutait que l'os du bras allait être visible. Il décida de prévenir, après tout, il ne voulait pas avoir une femme évanouie pour cause de vision qu'elle ne supportait pas sur les bras...

"Ils sont tous morts, ce foutu voleur s'est tiré... Mon bras va ête horrible à voir, alors si tu ne supportes pas de voir du sang, dans ce cas-ci, on pourrait presque faire un cours d'anatomie du bras humain, je te conseillerait de te tourner..."

C'était une manière, bien qu'extrêmement maladroite, de lui dire que oui, il se souciait d'elle et que non, il ne voulait pas qu'elle ait un malaise. Mais allait-elle comprendre?

Kime sentit la hargne l'envahir tandis qu'elle se débarrassait des trois derniers. Elle en avait assez de se battre et elle était soulagé d'abattre celui qu'elle croyait être le dernier. Alors qu'elle plantait sa fine lame dans le corps du dernier gobelin, elle attendit Sanosaki qui s'adressait à elle.

"Ils sont tous morts, ce foutu voleur s'est tiré... Mon bras va ête horrible à voir, alors si tu ne supportes pas de voir du sang, dans ce cas-ci, on pourrait presque faire un cours d'anatomie du bras humain, je te conseillerait de te tourner..."

Pardon? Elle fronça les sourcils. Elle ne pensait pas qu'il était si gravement blessé. Elle se tourna lentement vers lui, s'assurant d'un regard circulaire qu'ils ne risqueraient plus d'être surpris par un dernier survivant, puis serrant les dents elle s'approcha du jeune homme qui était encore accroupi près du sol. Elle devait l'aider, il ne pourrait pas se soigner tout seul. Elle n'avait jamais rien vu de tel. Elle jeta un coup d'oeil critique à la blessure, sentant son estomac se resserrer.

- Laisse moi t'aider...

Elle s'accroupit près de lui.

- Tu as de quoi te soigner?

Elle regarda d'un air surpris les bandes qu'il tenait à la main.

Sanosaki fut plutôt impressionné de voir la réaction de la jeune femme lorsqu'il dévoila sa blessure. Il s'attendait à bien pire qu'un regard critique, mais il savait qu'elle avait l'estomac à l'envers de voir la plaie béante qu'il avait au bras. Il fallait le dire, la vue de l'os ainsi que tous les vaisseaux sanguins qui faisaient circuler le sang à découvert était particulièrement horrifiante pour quelqu'un qui ne connaissait rien au combat et aux blessures. Le métamorphe avait déjà torturé en arrachant des doigts à mains nues, en disloquant des bras et des jambes, et en défigurant en broyant les os des joues et en coupant le nez. Il avait vu pire. Il fut encore plus surpris de voir l'humaine s'accroupir à ses côtés et lui proposer de l'aider. Elle avait l'air surprise qu'il ait de quoi se soigner.

"Pour quelqu'un comme moi qui a souvent à se battre, et parce que ma défense naturelle, je veux dire sans ce gros manteau doublé qui pèse presque autant que moi, n'est pas formidable, je n'ai pas le choix, c'est une nécessité d'avoir quelque chose pour se soigner en tout temps. Alors oui, j'ai de quoi me soigner."

C'était une autre chose que l'on pouvait constater en voyant la plaie béante de Sanosaki: il n'avait pas une once de gras dans le corps, et sa peau était beaucoup plus mince que celle de n'importe qui d'autre. Une simple griffure de chien, à peine frôlée, aurait suffi à la déchirer. Mais il avait les os solides, et les veines et artères qui se regénéraient rapidement. Le métamorphe avait plusieurs faiblesses, mais il avait réussi à les surmonter, ou à compenser ce qui lui manquait. Par exemple, sa vue déficiente du côté gauche, qui lui donnait parfois des difficultés à évaluer exactement les distances, et à voir précisément. ce qui venait de ce côté sans l'aide de l'oeil droit. Il avait dû pour compenser ce manque développer son ouïe, son odorat ainsi qu'un sixième sens. Il savait qu'il n'avait pas la constitution la plus forte, mais il possédait tout de même une grande vitesse, beaucoup d'agilité et une force plus que remarquable pour la taille de ses membres, qui n'avaient rien d'impressionnant étant donné que sa musculature se développait en longueur plus qu'en masse, il n'était donc pas très imposant, mais assez musclé tout de même.

"Un peu d'aide ne serait pas de refus, je te remercie."

Il avait déjà étendu un épais onguent à la consistance un peu douteuse sur sa plaie, mais allait avoir de la difficulté à la panser, étant donné qu'il n'avait qu'une seule main qui pouvait faire le travail.

"Si tu peux simplement l'enrouler autour de mon bras, en serrant..."

Il déplia le bras, et tendit à Brume Obscure le morceau de tissu, dont il tenait un bout, et il le passa autour du membre blessé. C'était silencieux, soudainement, et il n'aimait pas le silence, car c'était tout ce qui avait accompagné son enfance, et ses folies. Le silence...Lui, forcé au silence. Il eut soudainement une idée.

"Tu ne m'as toujours pas dit d'où tu viens... J'aimerais bien savoir..."

Kime continua de serrer les dents tout le temps qu'elle était près de Sanosaki. Elle était horrifiée de voir l'état de son bras, mais essayant de calmer sa respiration, elle attrapa le bandage que lui tendait le jeune homme. Il fallait absolument qu'elle garde une certaine contenance, elle ne voulait pas avoir l'air ridicule auprès du métamorphe. On lui avait toujours appris qu'il fallait surmonter ses peurs. Elle l'aida donc à se soigner, serrant la bande, tout en espérant ne pas trop lui faire mal. Elle lui jetai un coup d'oeil de temps en temps, s'assurant qu'elle ne lui faisait pas top mal. Pendant ce temps, le silence revint autour d'eux. Le silence était toujours lourd lorsqu'il était total et Sanosaki devait être comme elle et ne pas l'apprécier, car il s'empressa de le rompre.

"Tu ne m'as toujours pas dit d'où tu viens... J'aimerais bien savoir..."

Kime se rembrunit un peu. Elle n'aimait pas parler de là où elle venait, de son passé. Elle comptait repartir à zéro ici, se faire une nouvelle vie.

- Je viens d'ailleurs, je n'ai pas envie d'en parler.

Elle se releva une fois le bandage terminé et s'excusa avant de s'éloigner d'un pas rapide de quelque mètres. Elle avait serré les dents tout le temps qu'elle avait soigné le jeune homme, mais elle ne put se retenir plus longtemps et recracha un flot acide. elle s'essuya la bouche avant d'aller le rejoindre.

Il écouta à peine la réponse qu'elle lui donna, mais il savait qu'il n'en saurait pas plus. À nouveau plongé dans ses pensées, il se laissa dériver dans les méandres de son passé, cette fois un moment relativement proche...Une fois de plus, la même personne qui hantait son esprit...

Il l'avait repérée, alors qu'il surveillait sa proie avec les deux autres qui l'accompagnaient. Mais elle n'était pas seule. Elle était avec un jeune homme du même âge que lui...Ses deux comparses avaient une cible...lui en avait deux, et il comptait bien s'en charger... Il avait sauté dessus comme un enragé. Sanosaki tuait de sang froid depuis quatre ans, depuis qu'il avait onze ans, et l'idée d'un autre meurtre ne le dérangeait pas...surtout depuis que c'était celui qu'il envisageait d'éliminer...Il l'avait eu...La fille était couverte de sang, et morte de peur, mais bien en vie, et sans une égratignure. Elle qui lui avait craché au visage, il n'osait même pas la toucher...Il était juste parti sans un mot, sans un geste de plus, sous les regards ébahis des passants, alors que la fille se mettait à pleurer, assise par terre, encore sous le choc. Il s'était fait remarquer, et les Loups n'aimaient pas ça. Vint ensuite le temps de passer aux aveux, car beaucoup de questions sans réponses avaient été soulevées face à ce qu'il avait fait, de façon tout à fait imprévue.
"Pourquoi tu l'as attaqué, Sano?"
Un silence. Puis il répondit.
"Je la hais. Je la déteste, cette fille..."
L'autre hésita.
"Pourquoi t'être attaqué à lui, alors?"
Un autre silence. Le jeune homme, qui avait alors quinze ans, se parlait seul, plongé dans un délire plus qu'inquiétant.
"Je la déteste...Je la hais...Mais elle est si belle...Je ne pouvais pas le laisser...Elle était trop bien pour lui...Je la déteste, je la hais..."

Il se souvenait de cette époque. Après un bout de temps, il avait réussi à la revoir. Puis elle s'était tirée, emmenant avec elle l'arme qu'il avait promis de garder, ainsi que peut-être une partie de lui...Il la haïssait, c'était vrai. Chaque facette de sa personnalité le dégoûtait, mais pourtant, il ne cessait de penser à elle... Même là, il était songeur... Lorsqu'il reprit contact un instant avec la réalité, il vit quelque chose qui suscita un peu d'inquiétude.

"Ça va?"

Sanosaki semblait plongé dans ses pensées lorsqu'elle s'était éloignée. Lorsqu'elle était ailleurs, elle avait du s'occuper d'un des enfants de sa bande qui était passé sous les roues d'un véhicule. Il saignait abondamment et ce n'était pas beau à voir. Elle s'était forcée à rester près de lui jusqu'à la fin, ne pouvant rien faire pour le sauver. Le bras du jeune homme n'était pas loin de ressembler à la scène sanglante et les souvenirs étaient revenus violemment à sa mémoire. Si elle avait pu garder une certaine contenance, elle n'avait pu tenir jusqu'au bout et sentant la bile remonter dans son estomac, elle s'était éloignée rapidement. Elle revenait près de Sanosaki alors qu'il s'assurait qu'elle allait bien.

- Oui, ça va aller...

Elle attrapa la petite gourde d'eau qu'elle portait à la ceinture pour faire passer le goût acide de la bile.

- Et toi? Ça va aller? Il faut se trouver un endroit pour la nuit...

Elle regarda autour d'elle. N'avait-il pas pensé à un lieu avant qu'ils ne soient attaquer par la horde?

Il la regarda revenir et prendre la gourde d'eau qu'elle avait, pobablement pour faire passer le goût déplaisant qu'elle avait à la bouche. Ça allait aller pour elle.

- Et toi? Ça va aller? Il faut se trouver un endroit pour la nuit...

Il fut un peu surpris de la question, et n'attendit pas pour répondre, mis à part une petite réflexion de quelques secondes.

"Moi? Bien sûr que ça va aller...J'ai survécu à pire qu'un bras, crois-moi... Mais ça me surprend que tu poses la question, et je ne dis pas cela pour t'insulter..."

Il recouvrit le bras blessé avec sa manche, et continua d'un ton un peu amusé.

"C'est simplement parce que tu n'avais pas trop l'air de m'apprécier, au début...Quoique ce n'est peut-être toujours pas le cas..."

Il regarda un peu partout autour, enfin, façon de parler, puisqu'il n'y voyait pratiquement rien, mis à part quelques éclats de lumière provenant des bâtiments autour tels la taverne et les auberges. Il huma une odeur de sang, très forte provenant de la plupart des ruelles, mais surtout de l'une d'entre elles, et il entendait plusieurs cris qui provenaient de là.

*Hmmm...Il faudra que j'y aille, une bonne fois...*

Une odeur parvenait toujours à son nez, alors qu'il se déplaçait vers un de ces "nuages" de lumière, l'odeur de la misère. Des centaines de gens sans maison, sans nourriture, blessés, plusieurs tués, même. L'odeur des cadavres partout. La ville aurait eu besoin d'un grand nettoyage, les rats pullulaient partout, et certains morts étaient couverts de taches sombres, sous les bras et dans le cou. Instinctivement, Sanosaki aurait couvert son nez avec quelque chose, mais il savait deux choses: il était immunisé, et il avait déjà respiré l'air, plus rien ne pourrait changer. Finalement, il arriva devant une porte, les fenêtres du bâtiment étaient brisées, mais la lumière en émanait.

"C'est ici. Nulle part ailleurs, ils ne vont nous laisser entrer à cette heure, surtout couverts de sang, partiellement ou complètement. C'est pas du luxe, je te préviens. Mais au moins, t'auras un toît sur la tête. "

Il jeta un dernier regard aux cadavres dans la ruelle sombre qu'il venait de traverser, et écrasa d'un précis coup de pied un rat qui tentait d'entrer dans le bâtiment.

Kime regarda elle aussi autour d'elle cherchant un endroit pour dormir. Il l'a regardait d'un air amusé.

"C'est simplement parce que tu n'avais pas trop l'air de m'apprécier, au début...Quoique ce n'est peut-être toujours pas le cas..."

Elle esquissa un sourire avant de hausser les épaules. Il s'était dirigé vers un bâtiment qui semblait abandonné, dont les fenêtres étaient brisées, mais il y avait de la lumière qui en émanait.

"C'est ici. Nulle part ailleurs, ils ne vont nous laisser entrer à cette heure, surtout couverts de sang, partiellement ou complètement. C'est pas du luxe, je te préviens. Mais au moins, t'auras un toît sur la tête. "

- De toute façon, je crois que nous n'avons pas trop le choix.

Elle poussa la porte du bâtiment et y entra.

- De toute façon, je crois que nous n'avons pas trop le choix.

Même si elle ne semblait pas trop s'y plaire, elle n'avait pas vraiment le choix. Lui connaissait assez peu l'endroit cela ne faisait qu'une semaine qu'il y venait, mais savait que personne ici n'allait oser s'opposer à lui s'il demandait place pour se reposer, et même les plus pervers de ces saoûlards ne lui tenaient pas tête bien longtemps. Ils étaient nombreux, mais leurs yeux ne savaient pas faire la différence entre une illusion et la réalité. L'humaine n'avait probablement pas encore réalisé quel genre d'endroit c'était, mais tant qu'il y restait, tant qu'elle était armée, et tant qu'il était de son côté, elle ne craignait rien, du moins, pas venant des autres humains présents dans ce bâtiment qu'on pouvait presque qualifier de délabré. Des rénovations, il y en avait à faire. C'était parfois de cette façon que Sanosaki repayait l'aubergiste, parfois aussi lui accordait-il une nuit de repos, car il y avait fort à faire une fois le soleil et tous les alcooliques couchés, pour ceux qui étaient couchés, car d'autres s'adonnaient à de différentes activités... La pauvre femme avait fini par le comprendre, le métamorphe ne dormait que rarement, c'était une habitude qu'il avait perdue depuis plusieurs années, après les...traitements qu'il avait subis, traitements qui avaient grandement augmenté sa force et sa vitesse... Dès son entrée, beaucoup le fixèrent, ou plutôt fixèrent la jeune femme qui était avec lui, tous se posaient la même question: que faisait-elle avec ce psychopathe? Oui, ce psychopathe, car c'était le côté qu'il leur avait montré, lorsque, la première fois qu'il était entré, il avait défiguré de quelques coups de poings et de griffes l'un d'entre eux, avec un sang-froid qui leur avait fait comprendre que lorsqu'il était là, on le respectait, et on respectait les membres de la gent féminine présentes, lors des rares fois où il y en avait. Il leur lança un regard froid, puis se tourna vers Brume Obscure.

"Si tu veux boire ou manger quelque chose, c'est le temps. Je paie."

Certains semblaient avoir décidé de le confronter, et comploter dans un coin, le métamorphe entendit quelques murmures, et le son d'un minuscule fracas métallique, mais tout était calme pour le moment. Il salua d'un geste l'aubergiste, qui lui répondit d'un grand sourire, sous ses traits tirés, puis déposa une poignée de pièces d'or sur le comptoir.

"Deux grands verres d'eau, une assiette de ce que tu as préparé, peu importe ce que c'est, et le même "cocktail" que d'habitude. S'il-te-plaît. "

Elle acquiesça, tout en préparant ce qu'il lui avait demandé, alors que lui se tournait vers l'humaine, car il n'avait commandé que pour lui-même. Alors qu'elle lui amenait une assiette de bouillie de viande aux légumes, les deux verres d'eau et une boisson rouge comme du sang à la consistance qui ressemblait beaucoup à celle d'un mélange de sang de boeuf mêlé à de l'alcool, il lui fit un signe signifiant simplement qu'il allait payer pour l'autre aussi. Elle fixa Brume Obscure un moment, un sourire aimable sur le visage, puis lui demanda.

"Je peux vous servir quelque chose, mademoiselle? J'ai encore du ragoût d'oie, ou de la bouillie de boeuf...ce n'est pas le choix qui manque ici..."

Sanosaki s'installait au comptoir, attendant que la jeune femme ait pris quelque chose, mais il surveillait en réalité les autres du coin de l'oeil...

Kime l'avait suivi à l'intérieur. Comme il y faisait un peu plus clair que dehors, ses yeux ne tardèrent pas à s'habituer à la douce pénombre, régnant à l'intérieur. Visiblement Sano était connu en ce lieu et les bruits de conversations s'arrêtèrent à leur entrée. Elle sentait les regards plantés sur elle, mais elle ne laissa rien transparaître d'une gêne possible. Il se tourna vers elle.

"Si tu veux boire ou manger quelque chose, c'est le temps. Je paie."

Bonne nouvelle, elle aurait pas eu grand chose pour payer quoi que ce soit... L'aubergiste apporta la commande de Sano et Kime passa la sienne.

- Une assiette de râgout, ça ira très bien. Avec un verre d'alcool, peut importe quoi, mais pas trop fort quand même.

*Juste de quoi me remettre de mes émotions*, pensa t'elle.

Elle observa Sanosaki, elle le sentait à l'affût comme se méfiant de quelque chose. Elle allait devoir l'interroger, si elle voulait rester en vie en ce lieu.

Il fut content de voir la jeune femme commander quelque chose, il ne voulait pas qu'elle se prive parce que c'était lui qui payait. Il était plutôt riche, et, comme il aimait bien dire, avec lui, "on finit toujours par s'arranger"...

- Une assiette de râgout, ça ira très bien. Avec un verre d'alcool, peut importe quoi, mais pas trop fort quand même.

Lui qui était assis fixait du coin de l'oeil droit, car le gauche n'avait pas une très bonne vision, les autres hommes présents dans la salle. Avait-elle remarqué les regards qu'il lui lançaient? Le métamorphe l'ignorait, et il s'en foutait pas mal. Les jaloux s'imaginaient des choses... Sanosaki n'avait pas jusqu'à maintenant regardé vraiment Brume Obscure, en tout cas, pas comme ces hommes regardaient les femmes. Il semblait très passif pour cela, il ne semblait avoir aucun désir, contrairement aux autres enragés qui étaient tous assis dans leur coin à comploter en pensant qu'il ne les entendait pas. Grave erreur.... Il n'avait peut-être pas l'oreille d'un vampire, mais c'était tout de même l'un des sens les plus développés, et il s'approchait tout de même, bien qu'encore à distance, de cette ouïe "suprême" que possédaient les buveurs de sang. Il gardait l'oreille alerte, tout en fixant discrètement la jeune humaine. Jeune...Elle semblait l'être, à peu près le même âge que lui... Il constatait alors ses traits. La longue chevelure blonde, ses yeux noirs... Il était vrai qu'elle pouvait avoir l'air d'une gamine, pas très grande, et mince... Un mot prononcé dans le coin de la salle détourna brusquement son attention, et il tourna aussi subitement la tête. Il n'aimait pas ces sourires narquois sur leurs visages... Et avec un bras en moins, ou plutôt à moitié en moins, car son usage était limité, mais il pouvait tout de même servir, ça risquait d'être plus corsé de se défendre sans se faire avoir par derrière, car s'il fallait le ressentir lorsqu'on vous attaquait dans votre dos, aussi faut-il pouvoir réagir... Mais ils semblaient calmes, du moins pour le moment. Il finit son assiette, qui fut immédiatement enlevée de sur le comptoir par l'aubergiste, ainsi que les deux verres d'eau, qui avaient fini sur son bras, au travers des bandages. Il ne lui restait que son cocktail sanglant, et il en redemanda un autre verre, attendant que la jeune femme finisse elle aussi son assiette et son verre d'alcool. L'aubergiste avait un petit récipient où elle mettait le sang des animaux qui, une fois tués, composaient les repas. Elle s'en saisit, et versa une partie de son contenu dans le verre du métamorphe, y ajoutant de l'alcool très fort. Ce genre de cocktail était un classique, là d'où il venait, et c'était avec ce genre de boisson qu'il avait déjà réussi à se saoûler, après une quinzaine de verres. Alors qu'il dégustait son breuvage, il vit l'un des hommes se lever. Il sortit quelques pièces de son manteau, et il en remit plus qu'il n'aurait eu besoin d'en donner à la femme, qui lui demanda, hésitante devant la somme.

"P...Prendrez-vous autre chose?"

Il se leva, contourna Brume Obscure, comme pour aller se placer entre les saoûlards et elle, mais, sans les regarder, s'accota sur le comptoir, laissant la fine silhouette d'un sabre bien rangé, mais à portée de main, se dessiner sous les pans de son ample manteau noir.

"Une chambre. Nous prendrons une chambre."

Il lança un regard en coin aux autres, finissant d'une traite son verre, et il le déposa lourdement sur le comptoir en avertissant les hommes du regard.

"Ce sera tout."

Kime remercia d'un geste de tête l'aubergiste qui venait de déposer une assiette devant elle, ainsi qu'un verre remplit d'un liquide légèrement doré. Attrapant sa fourchette, elle sentait confusément, que les regards ne la lâchaient pas, elle sentait aussi que Sano était toujours aux aguets. Elle ne savait pas qui il surveillait, mais elle savait aussi qu'avec lui elle serait en sécurité.
Elle le vit alors tourner la tête brusquement. Elle n'était pas du genre à être toujours anxieuse, mais là, elle devait reconnaître qu'elle n'était pas tranquille. Il vida ses verres, puis lança quelques pièces sur le comptoir. Tout en finissant de manger rapidement, elle continua de l'observer. Que pensait les hommes en la regardant ainsi? Où plutôt en la reluquant. Aucun d'entre eux ne l'avait touché et pourtant elle se sentait salie par leur regard. Elle aurait prit une bain avec un grand plaisir. Et que pensait Sanosaki? Il devait s'en foutre complètement, il semblait détaché de tout.
Elle lui jeta un coup d'oeil surprit lorsqu'elle l'entendit dire qu'ils prendrait aussi une chambre. Une seule? Ils n'étaient pas si intime que ça. Elle jeta un coup d'oeil discret à sa bourse, la soupesant. Elle avait de quoi se prendre une chambre et peut-être même un bain, mais était-ce une bonne chose, avec tous ces hommes ici présents? du coup après réflexion, elle ne dit rien et vida d'un geste rapide son verre. La boisson la réchauffa agréablement, tout en circulant en elle. Elle se sentait déjà mieux, de nouveau prête à affronter n'importe quoi.

Sanosaki jeta un regard glacial aux hommes, puis il regarda la jeune femme, qui semblait confuse. Elle n'avait visiblement pas compris.

*Quoique jamais je n'en ai parlé à qui que ce soit... Ceux qui le savent sont ceux qui l'ont remarqué...*

Il fixa plus attentivement ses yeux, puis un sourire machiavélique étira ses traits, alors qu'il entendait des pas qui tentaient de se faire discrets.

"Ne t'inquiète pas. Je ne dormirai pas avec toi... Je crois plutôt que je passerai le reste de la nuit dans le couloir à m'assurer que les voyeurs n'aillent pas trop loin..."

Il avait légèrement haussé le ton, pour leur faire comprendre qu'ils auraient affaire à lui s'ils désiraient entrer dans la chambre. Il fit un signe rapide à l'aubergiste, sans même la regarder, et, rapidement, elle finit de nettoyer les verres.

"Suivez-moi..."

Elle était terrifiée, principalement à l'idée qu'un carnage se produise dans son auberge qui, bien qu'en mauvais état, était la seule chose qui lui permettait de vivre. Sans clients, elle n'avait plus rien à manger, et les rumeurs allaient assez rapidement, à l'habitude. On finirait par le savoir assez rapidement, s'il arrivait quelque chose. Et ce serait la ruine. Lorsqu'elle arriva devant une porte qui ne portait aucun numéro, visiblement plus belle que les autres du couloir, elle l'ouvrit, et s'écarta du chemin tout en esquissant une courbette. Sanosaki n'en fit rien, il savait très bien ce qu'elle voulait lui dire, et il attendait qu'elle le fasse, bien qu'il sache très bien qu'elle avait tellement peur qu'elle n'osait pas. Il décida de la faire parler.

"Quelque chose semble te troubler..."

Un ton doucereux. Comme s'il ignorait ce qui se tramait derrière les yeux verts qui, tels des radars, se promenaient partout autour, très nerveusement. Elle hésitait.

*Comme un livre ouvert...Elle n'a aucune malice, tellement naïve, contrairement à une certaine jeune femme blonde aux yeux noirs que je connais à peine... Ainsi qu'à cette charmante petite elfe voleuse, qui a réussi à égarer ma précieuse arme...Elle, si je la revois...*

L'aubergiste se décida finalement à parler.

"Je...Je vous en prie, ne...ne...n'en faites pas trop...Ce sont mes seuls clients..."

Un nouveau sourire du métamorphe. Le chat était sorti du sac, et c'était ce qu'il voulait.

"Je voudrais bien, mais s'ils osent m'insulter comme l'autre, la dernière fois, je n'aurai aucune pitié...Et même lui est revenu, alors ce n'est pas si pire que ça, il faut croire... Allez!"

Il la chassa d'un signe, et elle partit précipitamment. Il poussa Brume Obscure dans la pièce, d'un geste un peu brusque, mais respectueux tout de même.

"Entre! Il y a tout ce dont tu auras besoin... Je ne sais pas vraiment de quoi je parle, mais on m'a déjà dit que le seul regard de tels...bouffons malpropres est salissant lorsqu'ils vous fixent avec convoitise... Va donc prendre un bon bain, et repose-toi.Je reste ici pour veiller."

Son plan de la soirée était déjà tout fait. Il allait rester un moment, dans la plus grande discrétion, jusqu'à ce que les saoûlards se pointent, le pensant parti, et une fois qu'ils auraient compris la leçon, il allait pouvoir aller faire ses petites courses rapides, ou plutôt partir à la chasse...Si tout se déroulait comme prévu...Et ça, c'était rare...

Kime comme depuis le début s'était contentée d'assister aux échanges sans y prendre part. Elle ne dérogea pas à la règle, en se contentant de suivre Sanosaki et l'aubergiste en haut d'un escalier branlant. Elle leur avait alors ouvert la porte d'une chambre simple, mais relativement propre.
Devant la porte, Sanosaki échangea encore quelques paroles avec l'aubergiste avant de pousser Brume obscure dans la petite chambre.

"Entre! Il y a tout ce dont tu auras besoin... Je ne sais pas vraiment de quoi je parle, mais on m'a déjà dit que le seul regard de tels...bouffons malpropres est salissant lorsqu'ils vous fixent avec convoitise... Va donc prendre un bon bain, et repose-toi. Je reste ici pour veiller."

A ce qu'elle avait cru comprendre lorsqu'ils étaient encore en bas, il ne comptait pas dormir avec elle. Bien qu'elle en fut rassurée, elle se demanda s'il allait tout de même prendre quelques heures de sommeil. Avec sa blessure, il en aurait eu bien besoin.
Elle jeta un coup d'oeil dans la pièce, appréciant de pouvoir se délasser quelques minutes dans un bon bain chaud. Elle n'avait guère l'habitude auparavant d'être ainsi remarqué par les hommes, mais elle savait qu'elle grandissait et qu'elle avait beaucoup changé.

- Tu ne veux même pas prendre un bain toi aussi? Où même seulement quelques heures de sommeil?

Sanosaki l'abandonna dans la chambre et elle ne tarda guère à se déshabiller avant de se glisser dans l'eau chaude du bain. Elle ferma les yeux, se laissant envahir par la douce torpeur, se délaissant de la dure journée. Si tous les jours se déroulaient sur le même schéma, il allait falloir qu'elle s'endurcisse.

Elle continuait de protester, enfin, d'une certaine façon, mais Sanosaki ne voulait pas lui parler de ses plans du soir. Il le reconnaissait, elle avait été efficace lorsqu'ils s'étaient fait attaquer par les créatures, mais il voulait être seul, le plus possible, car il y avait probablement plus qu'on aurait pu le croire là-dedans. Mais elle insistait.

- Tu ne veux même pas prendre un bain toi aussi? Où même seulement quelques heures de sommeil?

Il soupira, puis un élancement de sa blessure le ramena à la réalité: s'il voulait aller poursuivre celui ou celle qui lui avait fait cela, il allait devoir attendre: l'ennemi savait se servir de l'arme qu'il voulait, et avec son bras dans cet état, il risquait d'avoir des problèmes. Il décida donc de rester à l'intérieur pour la nuit, et s'assit dans le couloir, juste à côté de la porte de la chambre, veillant, mais il était vrai qu'il était fatigué. Il finit donc par s'assoupir...

[Désolé, c'est pas très long, j'avais pas énormément de temps...]

Kime laissa donc courir pour Sano, de toute façon il faisait bien comme il le souhaitait. Elle prit donc son bain tranquillement avant de se glisser sur la paillasse pour dormir quelques heures. Elle ne craignait rien sachant que le métamorphe veillait.

Après quelques heures silencieuses, un petit groupe d'hommes particulièrement éméchés s'approcha de la chambre en ricanant. Ils avaient tellement bus, qu'il n'aperçurent pas tout de suite Sanosaki qui dormait non loin de la porte de la chambre de la jeune fille. L'un d'eux le contourna et poussa la porte de la chambre. Les autres suivirent mais le dernier trébucha sur le pieds de Sanosaki.

Sanosaki dormait paisiblement, et pas un bruit ne venait déranger son repos. Oui, le moindre son le dérangeait lorsqu'il dormait, et ce pour deux raisons. La première était qu'il avait une ouïe assez fine, et il entendait bien des choses que la plupart des vivants ne sauraient distinguer. La seconde raison était une question de sang, pour ainsi parler. Comme tous les aînés de chaque génération de sa famille, il possédait un don très particulier, celui de pouvoir entendre, sentir, ressentir tout ce qui se passait autour d'eux pendant leur sommeil. Il avait ainsi conscience de tous les petits craquements, de les effluves qui provenaient de l'extérieur, ainsi que des changements de la température ambiante. C'était très pratique, mais lorsqu'on avait des sens très développés, ça empêchait souvent d'être complètement reposé. Mais lui qui s'était habitué à assez peu de sommeil ne s'en dérangeait pas, surtout là. Il aimait bien la perspective de dormir un peu tout en montant la garde. Puis, soudainement, de bruyants craquements dans les escaliers se firent entendre, suivis de lourds pas dans le couloir. Et pas un seul ne semblait l'avoir remarqué...

*Ils sont saoûls, ça c'est sûr...*

Il écoutait attentivement, ignorant s'ils allaient simplement passer devant sans rien faire. Ils semblaient décidés à y aller. Mais un problème s'imposait: il avait beau entendre, et être capable de penser, il était difficile pour lui-même de se réveiller de son propre chef. Heureusement pour lui, le dernier trébucha sur lui, et il ouvrit les yeux en sursautant. Il n'y avait plus aucune lumière dans le couloir, mais il entendait l'aubergiste qui rangeait ses affaires en bas des escaliers. Elle échappa une pile d'assiettes, qui se brisèrent en morceaux en tombant sur le sol, causant un grand fracas, et plusieurs exclamations arrivèrent des chambres: le bruit avait réveillé les gens qui, surpris, se demandaient ce qui arrivait, mais n'osaient pas sortir. Mais il n'avait pas le temps de l'aider, car il était maintenant clair pour lui qu'ils se dirigeaient vers la chambre de Brume Obscure, et le premier avait déjà poussé la porte.

*Pourvu qu'elle se soit réveillée...*

Rapidement, il s'élança vers la chambre, mais un bras lui bloqua le chemin, et une silhouette apparut dans l'obscurité qui aurait été totale sans la faible lueur provenant de l'étage inférieur.

"Poussez-vous, vous êtes dans le chemin!"

L'homme ne broncha pas, et une odeur à moitié familière parvint au nez du métamorphe. S'il ne pouvait voir les traits de son opposant, il n'en reconnaissait pas vraiment l'odeur non plus.

"Qui êtes-vous? Qu'est-ce que vous me voulez?"

Un petit rire se fit entendre, un rire mielleux qu'il détestait. Le mystérieux individu le saisit à la gorge et le plaqua durement sur le mur du couloir. La première réaction du métamorphe canin fut de se débattre mais la poigne était trop puissante pour lui. L'homme aurait pu lui casser le cou simplement en la refermant, puisque ses doigts entouraient complètement le cou de Sano, qui avait peine à respirer.

"B...BRUME OBSCURE! DÉ..."

L'autre le fit taire en plaquant sa main contre la mâchoire du métamorphe, et sa voix doucereuse se fit entrendre, il chuchotait presque.

"Tsssk! Silence! Tu vas réveiller tout le monde..."

Il se mit à rire, un rire malveillant. Ses yeux argentés étaient luisants dans la pénombre.

"Ce que je veux? Une simple information..."

Il serra brusquement son étreinte, puis la relâcha.

"Qu'as-tu fait de ma fille? Je la vois, dans ta tête, son image... Tsssk! Cesse de te débattre, ton amie se débrouillera très bien sans toi..."

Sano se débattit encore un moment, puis décida de recourir aux moyens extrêmes. Il se concentra fortement, s'imaginant à l'image d'un animal beaucoup plus massif, un ours. Déjà, ses mains s'étaient transformées, et un pelage semblait avoir poussé. Lentement tout son corps changeait de forme, et l'homme n'eut bientôt d'autre choix que de lâcher prise, lorsqu'un puissant coup de patte l'envoya contre le mur en haut de la cage d'escalier, et il s'écrasa lourdement en bas. L'ours rugit, et se dirigea vers la chambre pendant que, plus bas, l'homme reprenait lentement conscience...

Brume obscure dormait d'un sommeil assez profond. Cela faisait plusieurs nuits qu'elle dormait peu et elle se sentait assez en sécurité pour se laisser aller dans les bras de Morphée. De ce fait elle n'entendit pas les hommes à moitié ivres entrer dans sa chambre. Elle n'entendit pas non plus l'homme qui s'approchait de son lit en ricanant. Il regarda la jeune fille se taisant un court instant, peut-être soufflé par sa beauté, puis bousculé par un camarade il tira sur le drap qui la recouvrait. Aussitôt, ce geste la dérangeant dans son sommeil, elle ouvrit les yeux et dégaina la courte lame qu'elle dissimulait sous l'oreiller.

- Recule, si tu ne veux pas avoir la gorge tranchée!

Sa voix était aussi froide que la glace et tranchante que le fer. Elle fusillait du regard les trois hommes qui avaient pénétrés dans sa chambre. Elle était maintenant tout à fait réveillé, et elle se leva, forçant l'homme à reculer.

- Sano?

Elle était un peu intriguée que Sanosaki n'est pas interpellé les individus avant qu'ils n'entrent dans la chambre. Il lui était peut-être arrivé quelque chose... Elle se dirigea vers la porte, ramenant son regard sur les hommes qui battaient retraite précipitamment et maladroitement.

Malheureusement pour Sano, se transformer ainsi et aussi rapidement lui avait demandé beaucoup d'énergie, et il reprit forme humaine, de peur de s'écrouler, trop faible. Il était clair que l'homme, qui qu'il soit, en voulait à sa vie, du moins d'une certaine façon, mais il n'était pas le seul. Nombre de personnes avaient juré de se venger en faisant couler son sang, ou bien de planter sa tête sur un poteau, ou encore de sacrifier son coeur à leur idole en retour du sang que le métamorphe avait fait couler par le passé. Cet homme pouvait être le père de n'importe qui, Sano avait connu tellement de membres de la gent féminine depuis neuf ans, et la plupart étaient mortes dans ses bras, ou avaient mystérieusement disparu après avoir été vues en sa compagnie. Chacun avait ses démons à refouler et à combattre... Ceux de Sanosaki étaient particulièrement forts et vicieux, et la poussée du sang lui avait fait commettre bien des actes que lui-même, même s'il était un criminel aux multiples meurtres et qu'il avait tué bien des fois de sang-froid, ne se serait jamais permis de réaliser. Le mystérieux individu qui l'avait assailli ne lui rappelait personne, mais il semblait à tout prix vouloir savoir, et il paraissait prêt à tout pour obtenir ce qu'il désirait, même à commettre les pires choses qui fussent. Le métamorphe s'écroula sous une nouvelle charge enchantée de l'homme. Haletant, il aurait voulu répondre, mais il ignorait de qui il parlait.

"Je ne peux rien vous dire! Il y a tellement de visages dans ma mémoire que je ne le sais pas! Si au moins, je pouvais voir les points en commun qu'elle avait avec vous, peut-être pourrais-je vous renseigner!"

En fait, il ne voulait que gagner un peu de temps, pour reprendre des forces et pouvoir se défendre: il était vrai qu'il avait une excellente mémoire, mais dont l'aspect le plus faible était les visages. L'homme le fixa un instant, puis ôta sa capuche, dévoilant ainsi les traits irréguliers de son visage. Il ressemblait à un monstre, mais ses yeux argentés trahissaient son appartenance à un groupe qu'il connaissait bien, car il provenait de chez lui. Un sourire malveillant de l'individu dévoila des dents blanches comme l'ivoire, toutes pointues, comme celles d'un requin. Sanosaki constata la dentition de l'ennemi, mais surtout son visage, qui lui rappelait un vague souvenir, avec un soupçon de crainte.

"Qu'est-ce que la Tribe de KikenKowaï me veut exactement pour absolument tenir à me voir mort?"

L'homme ricana d'un rire grave et maléfique. Le métamorphe ne retenait peut-être pas très bien les visages, mais les voix ne lui échappaient jamais. Il avait déjà entendu ce rire.

"Mais c'est qu'il comprend vite, le gamin qu'Arikado a élevé! La Tribe ne veut pas que tu te mêles de la prochaine guerre, et comme tu représentes l'espoir d'une union possible entre Loups et Chasseurs, ce qui serait très dangereux pour nous, eh bien la seule façon de te garder hors d'état de nuire , car je doute que tu ne veuilles nous rejoindre, était de t'éliminer!"

Sanosaki s'éloignait lentement, mais sûrement de l'autre, sans qu'il ne remarque quoi que ce soit. Il avait besoin d'espace, d'une distance suffisamment grande pour pouvoir détaler à toute vitesse. Il devait absolument retrouver son arme, et ce à tout prix, c'était maintenant devenu sa seule chance de survivre. Il lui fallait encore un peu de temps.

"Et c'est pour ça qu'ils t'ont désigné, toi, Karfla, le grand chef de la Tribe, pour venir m'éliminer? N'avaient-ils pas besoin de toi, de l'autre côté de la mer, pour anéantir les miens, parce que c'est ce que vous voulez faire depuis qu'on n'est plus de votre côté? Ou bien est-ce uniquement parce que ton plan n'a pas fonctionné exactement comme prévu, et que ta minable servante, Renn, a misérablement échoué lorsqu'elle a tenté de m'attirer dans un piège? Oh, comme je la plains... Elle qui croit qu'elle a tant d'importance à tes yeux, qu'arriverait-il si elle savait que ta seconde porte ton futur enfant? Si jamais je m'étais malencontreusement échappé en sa présence? N'est-ce pas plutôt pour me faire tair..."

Sanosaki aperçut alors Brume Obscure qui sortait dans le couloir. Il voulut lui faire signe de sa cacher, mais le dénommé Karfla avait suivi son regard, et il tourna la tête vers celle qui était une parfaite inconnue pour lui. Il la sonda, puis laissa échapper un petit rire.

"Une simple humaine... Tu ne nous présentes pas? C'est bien impoli de ta part Sanosaki... Et ne crois pas que tu pourras t'enfuir aussi facilement...Ne sommes-nous pas des anciens alliés? Dans ce cas, je me présente: je me nomme Karlfa."

Il s'approcha de Brume Obscure, et lui tendit sa main, dont la peau ivoire semblait glacée, tout comme ses yeux argentés qui observaient de plus près les traits de l'humaine. Il fixait avec convoitise la jeune femme, et ne put s'empêcher de se lécher les babines à l'idée d'avoir un aussi bon repas presque à la portée de ses mains griffues...

Les trois hommes avaient plus ou moins prit la fuite, effrayés par la détermination de la jeune fille, mais aussi par l'aura que dégageait l'individu dans le couloir. Brume obscure stoppa nette elle aussi en voyant le métamorphe aux prises de l'individu. Elle aussi ressentait la puissance qui se dégageait de lui. Elle eut le réflexe de se dissimuler aux regards des deux combattants, mais n'en eut pas le temps. Elle sentit alors le regard inquisiteur du nouveau qui la sondait sans aucuns scrupules avant de laisser échapper un petit rire.

"Une simple humaine... Tu ne nous présentes pas? C'est bien impoli de ta part Sanosaki... Et ne crois pas que tu pourras t'enfuir aussi facilement...Ne sommes-nous pas des anciens alliés? Dans ce cas, je me présente: je me nomme Karlfa."

Elle écoutait, attentive, tandis que l'homme se rapprochait pour lui serrer la main.

*D'anciens alliés? Voilà qui est surprenant...*

Toutefois la jeune fille ne connaissait pas assez Sano pour savoir qui il était vraiment, ni d'où il venait. Il semblait simplement en mauvaise posture. Elle lança un regard à l'homme qui attendait toujours, la main tendue vers elle. Elle abaissa donc la lame de son poignard vers le bas et lui serra la main du bout des doigts.

- Brume obscure.

La peau de l'autre était glaciale et son regard sembla la transpercer. Elle n'aimait pas son sourire.
Que voulait Sano? Gagner du temps? Il semblait désarmé et sa blessure n'était pas encore guérie.

- Brume obscure.

Sanosaki serra les dents en la voyant serrer la main de l'homme, qui, par la suite, l'ouvrit et la referma à plusieurs reprises, comme s'il avait ressenti quelque chose, ce qui attisa encore plus la méfiance du métamorphe. Il était vrai qu'il avai gardé secret les méandres de son passé, et il s'en voulait un peu parce qu'un minimum de savoir sur ce qui lui était arrivé aurait été largement suffisant pour qu'elle se tienne loin de lui, quitte à avoir l'air impolie. Il ne pouvait se résigner à l'abandonner, il allait devoir jouer de ruse pour se débarrasser de lui, car même leurs forces réunies, avec en plus celle de tous les monstres qu'ils avaient affrontés un peu plus tôt, n'étaient pas suffisantes pour le vaincre. Il était, pour ainsi dire, à un niveau de loin supérieur au leur. Il aurait fallu à Sanosaki une arme digne de ce nom, celle qu'il cherchait, pour pouvoir espérer pouvoir le vaincre. Karfla se tourna alors vers le métamorphe, qui avait le cou ensanglanté à cause des blessures, toutefois superficielles, infligées par l'homme.

"Dis-moi, Sano, as-tu toujours la fLame?
-La flamme?
-Sundeimasu. Tu as laissé sa soeur là-bas, mais elle, elle n'y était pas."

Le métamorphe lança un regard noir à l'autre, comprenant où il voulait en venir. Il le fixa directement dans les yeux, et lui répondit.

"Non. Une gamine me l'a piquée. De toute façon, Karfla, tu perds ton temps. Tu risques de te tuer en essayant de l'utiliser.
-Une gamine... Ah! Ça doit être elle que Renn poursuit... Dans ce cas, je n'aurai pas à attendre bien longtemps avant qu'elle ne retombe dans mes mains..."

Sanosaki faillit dire que la fille elle-même n'avait plus l'arme, mais il réalisa qu'il était préférable pour lui qu'il se taise. Il s'approcha plutôt de Brume Obscure, la sondant rapidement pour s'assurer qu'elle allait bien. Il fut rassuré de voir qu'elle n'avait rien, en tout cas, elle ne semblait rien avoir. Il espérait uniquement qu'elle ne succomberait pas, comme Renn Arikado l'avait fait plus de 300 ans plus tôt, au charme du puissant sorcier qu'était Karfla, selon les dires de son maître.

"Ça va? Tu n'as rien?"

Il préférait s'en assurer, au lieu de se préoccuper de lui-même. Il avait déjà perdu beaucoup de sang, et il était un peu étourdi, mais il tenait bon. Il se secoua la tête une ou deux fois, songeant à une façon de communiquer à la jeune femme son inquiétude. Il ne pouvait parler, l'homme entendait encore mieux que lui, et il savait qu'il surveillait également ses pensées. Il devait tout de même tenter quelque chose. Il lança à Brume Obscure un regard, néanmoins furtif, lui demandant de se méfier. Comprendrait-elle le message? Il n'en était pas certain, et la pénombre l'empêchait de voir dans les traits de l'humaine ce qu'elle pensait de l'autre. Il savait qu'elle n'était pas dupe, mais il possédait des pouvoirs qui excédait ceux de bien des gens. C'était plus qu'un sorcier, c'était aussi un mort-vivant, et la seule façon de l'éliminer était de saper son âme hors de son corps jusqu'à la dernière goutte. Ce fut ce moment que Karfla choisit pour sortir une forme métallique plutôt irrégulière de son manteau. La lame qu'il avait en main, d'une couleur bleutée, était courbée à plusieurs endroits, lui conférant une forme irrégulière, mais elle brillait d'une faible lueur qui parvint directement aux yeux de Sanosaki, qui, reconnaissant l'arme, bouillonnait de rage. Le métamorphe sortit ses aiguilles, alors que l'autre homme se mettait en garde. Qui allait attaquer le premier?

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